Monde arabe, est-ce vraiment le Printemps ?


Publié dans La Revue de la CFDT N°119 "LE MONDE ARABE, QUELS ENJEUX" Février 2013


Parler d’un « Printemps arabe » sonne comme une promesse, une appellation poétique optimiste et peu importe si elle est légèrement tronquée. Dans l’euphorie du lendemain des révolutions tunisienne et égyptienne, les observateurs s’emballent et y voient la version orientale du Printemps des peuples qu’a connu l’Europe à la moitié du xixe siècle. Bientôt des démocraties se mettront en place à Tunis et au Caire et, avec un effet domino, tous les peuples arabes se soulèveront les uns après les autres ; les tyrans plieront bagage et prendront la fuite avec leurs courtisans pour ne pas se retrouver embastillés ou guillotinés.

Il est vrai qu’il y a comme un air de 1989 dans le monde arabe : la région se réveille de sa torpeur, endormie depuis la décolonisation par ses propres libérateurs et leurs héritiers mués en autocrates. La révolution tunisienne, ce mouvement social qui a fait vaciller l’État policier de Ben Ali, a réussi. Une grève générale à Sfax et une autre à Tunis le lendemain, à l’appel des Unions régionales de l’UGTT (Union générale tunisienne du travail), sont venues à bout du président à 99 % par élection. Celle-ci a donné de l’espoir à tous ces épris de liberté du voisinage : faire tomber le régime est possible. Les Tunisiens ont fait des émules, et très rapidement, dans d’autres pays arabes, les manifestants ont pris les rues d’assaut en Égypte, au Yémen, en Libye, au Maroc, en Jordanie, à Bahreïn, en Syrie… Toutefois, les mobilisations ont pris des formes différentes d’un pays à l’autre. Les revendications se ressemblaient parfois, mais pas les motivations et encore moins l’issue.

Des caractéristiques propres à chaque pays

Le monde arabe n’est pas une zone homogène et il y a autant de réalités politiques, économiques et sociales différentes qu’il y a de pays. Ces dissemblances se sont dessinées au cours des siècles. Elles étaient même cultivées par les régimes en place au cours de la deuxième moitié du xxe siècle depuis la décolonisation de la région. La place de l’État par rapport à l’organisation traditionnelle communautaire, tribale ou clanique de la société est différente selon le pays. La composition des populations d’un point de vue ethnique et religieux est aussi différente d’un pays à l’autre. Certains pays arabes sont une mosaïque de croyances et parfois, même les majorités musulmanes y sont aussi divisées entre sunnites, chiites et autres.

Cependant, les pays arabes, monarchies pétrolières mises à part, ont en commun une population jeune, souvent diplômée et qui ne trouve pas de débouchés économiques. C’est là que les révoltes ont trouvé leur souffle. Par ailleurs, ce sont ces spécificités qui ont conduit à ce que chaque soulèvement ait ses propres caractéristiques allant du mouvement social jusqu’aux situations de guerre civile. Ce sont également ces disparités qui ont donné à chaque soulèvement une issue distincte.

Après des pays où le régime a sacrifié son chef comme ultime tentative de survie comme en Tunisie ou en Égypte, les monarchies constitutionnelles comme le Maroc et la Jordanie ont pris au sérieux les mouvements sociaux qui agitent la région et ont amorcé des réformes politiques dès le début des mouvements. D’autres régimes ont joué le pourrissement, par naïveté pour un Kadhafi qui ne s’y attendait pas ou par cynisme politique pour un Assad qui a joué la carte du communautarisme. Le premier a laissé un pays divisé, le deuxième continue à jouer son va-tout au risque d’embraser toute la région dans sa fuite en avant.

Dans plusieurs autres pays arabes, des mouvements sociaux ou populaires n’ont pas eu beaucoup de succès. En Algérie, le mouvement qu’a essayé de lancer l’opposition n’a pas pris. Les pays sort d’une décennie noire après l’échec d’une expérience pluraliste au début des années 1990, et la population était lasse du climat de terreur. Une autre mobilisation a été étouffée dans l’indifférence de l’opinion publique internationale : au Bahreïn, pays de majorité chiite, socialement défavorisée, sous le règne d’une dynastie sunnite. Les mobilisations pacifistes y ont été réprimées dans le sang, notamment avec l’aide de la police du voisin saoudien. Les révoltés bahreïnis paient la position stratégique de leur pays entre la péninsule arabique et l’Iran. La famille Al Khalifa, cousine des Saoud, peut continuer à régner. Elle encourage désormais l’immigration des pays sunnites et laisse ses citoyens chiites dans une situation de précarité économique.

La présence des islamistes au pouvoir

Tous ces pays ne sont qu’au début d’un long processus de transition vers la démocratie qui ne sera pas aussi évident pour tous. Au lendemain des révolutions qui ont abouti, les pays concernés réalisent l’ampleur de la tâche : la fuite, l’emprisonnement ou l’exécution de leur ancien tyran n’était qu’un début et tout est à (re)construire. L’euphorie des révolutions passée, les peuples déchantent avec une transition ardue vers la démocratie. Surtout que tous ont fait le choix de réunir une assemblée constituante : la Tunisie et l’Égypte, où pourtant la culture de l’État ne date pas de ces révolutions, comme la Libye, où les années Kadhafi ont démonté État, collectivité et toute forme d’organisation administrative.

Ce choix de tout remettre à plat en décidant de se doter de nouvelles constitutions s’avère plus périlleux que prévu. Un acteur qui était jusque-là sous-estimé, s’impose comme incontournable sur la scène politique, c’est l’islam politique.

Pris de court par la révolution en Tunisie et absents au début du mouvement en Égypte, les islamistes ont tout de même su récolter les bénéfices politiques de ces révolutions. Face à une opposition laïque clairsemée et malmenée par les régimes de Ben Ali et de Moubarak, ils ont su se restructurer plus rapidement et apparaître comme l’alternative la plus crédible pour les électeurs. Les élections leur ont donné une large majorité en Égypte et les ont placés premiers en Tunisie où il leur a fallu composer avec d’autres partis pour constituer une majorité.

C’est donc dans le contexte instable d’une transition démocratique que les islamistes se retrouvent aux responsabilités, pour la première fois, dans un pays arabe. Leur discours, jusqu’à présent assez simple et dogmatique, est désormais confronté à une réalité complexe et pluraliste. Ils découvrent la Realpolitik et le pluralisme politique.

En Égypte et en Tunisie, les islamistes se retrouvent cernés. D’un côté, ils sont face à une société civile qui a repris vie après les révolutions et qui ne veut pas de retour en arrière. De l’autre, ils se font déborder par leur droite avec les salafistes, tenants d’une mouvance du wahabisme (né au xviiie siècle à Najd en Arabie). Ils prônent un islam rigoriste qui refuse tout compromis. Les islamistes au pouvoir doivent de ce fait gérer des débats sur la charia comme source du droit, sur le retour de la polygamie (pour la Tunisie) et même sur la destruction du Sphinx et des pyramides, que demandait un député salafiste égyptien. Dans le même temps, les revendications sociales des citoyens qui s’impatientent de voir les résultats du changement, quand ils ne notent pas que leur situation économique régresse, se font pressantes.

L’islam politique imaginait prendre sa revanche sur les nationalistes arabes, qui l’ont marginalisé pendant la lutte pour l’indépendance et après son obtention, mais peine à se montrer à la hauteur des enjeux. En s’inscrivant dans un contexte pluraliste, la mouvance islamiste se rend compte que son projet de société doit être revu si elle veut durer. Ce Printemps arabe qui l’a amenée aux responsabilités, elle ne l’a pas fait, mais elle peut être défaite par lui ; à moins que ce soit lui qui enterre ce vent de liberté.

L’apprentissage de la démocratie n’est pas chose facile. Dans les pays en pleine transition, c’est un apprentissage au quotidien autant pour les citoyens que pour les responsables politiques. Ces révolutions ne sont qu’un signe, c’est seulement si les transitions sont couronnées de succès qu’on pourra dire rétrospectivement que c’était bien un Printemps arabe, et malheureusement pas pour tous.

Quel Etat voulons-nous ?


Publié dans le bimestriel de l'association Cahiers de la Liberté mai-juin 2012. (Télécharger ici

S’il y a bien une question à laquelle aurait dû répondre l’Assemblée constituante, avant d’entamer la rédaction de la Constitution, c’était celle-là. Pourtant, les élus de l’Assemblée ne l’ont toujours pas posée et n’en ont jamais vraiment débattu. Pourtant, sans les bonnes questions, la Constituante aura du mal à apporter la moindre réponse cohérente, dans laquelle se reconnaîtra le plus grand nombre.

L’élection de l’Assemblée constituante a été un « rendez-vous raté », les candidats ont manqué l’occasion de mener ces débats et de confronter les différentes conceptions de l’Etat et son rôle. Ces débats ont été confisqués pour une campagne médiocre en contenu, les partis ont mené des campagnes classiques pour la conquête du pouvoir.  

Pourtant, définir le rôle de l’Etat n’est pas qu’une affaire de technocrates ou de constitutionalistes érudits. Tous les citoyens ont des attentes  en matière d’action publique, c’est aux élus de les traduire politiquement et de les transcrire dans le marbre constitutionnel.

La période est propice à un changement de logiciel politique, c’est l’occasion de redessiner le fonctionnement des institutions pour éviter les erreurs du passé. La Tunisie a besoin d’un nouveau système politique qui conjugue les aspirations de sa population, dans sa diversité géographique, sociale et même culturelle.

Un débat national, ou plus modestement, un débat à l’Assemblée constituante est nécessaire pour définir l’attente des Tunisiens pour leur Etat, la définition de son rôle et le périmètre de son action et de ses missions.


Un Etat fort, dans une République décentralisée

L’Assemblée constituante se doit de réfléchir, avant les élections générales annoncées, à la répartition des compétences entre les différents échelons (national,  régional et municipal) pour une action publique plus efficiente dans les territoires.

Dans la future constitution, la cohésion régionale doit être consacrée, non comme un vœu pieu, mais comme une réalité: assurer l’autonomie politique et financière, garantir la péréquation entre les régions, en fonction des ressources.

Sans remettre en cause un Etat fort, garant de la cohésion nationale, une partie des compétences peut être dévolue, totalement ou partiellement, aux collectivités territoriales revisitées.

Des compétences dévolues au niveau pertinent

Plusieurs compétences, comme les politiques d’aménagement du territoire, de transports publics peuvent être transférées totalement au niveau régional. D’autres, comme le développement économique ou la santé publique peuvent être partagées entre l’Etat et le niveau régional, le premier en charge du cadrage, le second pour la mise en œuvre. Enfin, certaines compétences peuvent être à la charge de l’ensemble des collectivités territoriales, comme l’entretien des bâtiments publics (écoles, collèges, lycées, universités, bâtiments administratifs…).

Un Etat régalien

Il est évident que l’Etat doit garder ses compétences régaliennes. Il aura, en amont, la responsabilité d’établir le cadre et les normes dans lesquels peuvent agir les collectivités, en aval, il aura à évaluer et corriger les disparités entre les territoires. L’Etat, devra garder ses administrations déconcentrées dans les territoires (gouvernorats et délégations), sous la responsabilité de représentants nommés.

Les compétences transférées ne peuvent être que sous la responsabilité de collectivités avec des exécutifs et conseils élus démocratiquement. Il reste à réfléchir quelle forme doivent adopter ces différentes collectivités. Il faut doter le niveau régional d’un exécutif et d’un conseil élu, autonome financièrement et politiquement sur les compétences qui lui seront dévolues.

 Nouveau rendez-vous raté ?

Malheureusement, ce n’était pas le rôle de l’Etat et de ses institutions qui étaient au centre des débats, lors du vote de l’organisation des pouvoirs en novembre dernier. Non, les discussions ont porté sur les intérêts partisans des uns et des autres. or  Si les élus de la Constituante continuent à réfléchir l’Etat comme un jeu de chaises musicales pour les postes clés, et à se voir comme des représentants de leur parti et non comme des représentants du peuple, la Tunisie va rater un nouveau  rendez-vous avec l’Histoire.

Légitimité… en pointillés



La légitimité ne se décrète pas, et ce n’est pas à force de la marteler qu’on l’acquiert. Les différents membres du Gouvernement de Hamadi Jebali n’ont de cesse que de matraquer qu’ils sont le " premier gouvernement légitime " de l’histoire de la Tunisie. Les responsables de la Troïka et leurs partisans clament aussi, à qui veut l’entendre, qu’ils sont le " Gouvernement de la Révolution ". Deux affirmations… Deux contre-vérités, historiques et politiques.

Ce Gouvernement n’a pas la primauté de la légitimité
Le Gouvernement d’Habib Bourguiba de 1956 était légitime, on ne peut le nier. Une légitimité tirée de la résistance au protectorat et de l’obtention de l’indépendance. Moncef Marzouki, qui aime à se revendiquer comme le premier Président élu, ne peut réécrire l’histoire et oublier que l’Assemblée constituante de 1956, qui a proclamé la République et a élu Bourguiba comme Président, était aussi une assemblée élue, où les organisations nationales qui ont participé à la résistance, notamment le Destour et l’UGTT, étaient représentées.

Elections Constituante - Mars 1956

La majorité actuelle a sûrement des comptes à régler avec Habib Bourguiba, et c’est son droit, mais cela ne justifie en rien la réécriture de l’Histoire a posteriori. Cela serait une offense aux grands hommes qui ont siégé dans cette Assemblée, tels que Hédi Nouira, Behi Ladgham, Ali Belhouane et bien d’autres. 

Ce Gouvernement n’a pas la « légitimité révolutionnaire »
Pour cela il aurait fallu que les membres de cette majorité aient fait, ou aient guidé, cette Révolution, ce qui n’est pas le cas. Les leaders de ces partis étaient (et on ne peut les en blâmer) exilés ou mis hors circuit par des années de prison. Mais une fois en place, ils auraient pu en profiter pour porter les revendications de la Révolution de liberté et de dignité. Il n’en a rien été, ils ont préféré l’appel au repli identitaire et ont fait de la foi un fonds de commerce.

Le jour du scrutin, a été celui où la logique révolutionnaire a cédé la place à la démocratie. Ce Gouvernement est issu des urnes et c’est de là qu’il tire sa légitimité voir article. Se présenter comme un "Gouvernement de la Révolution" est un affichage opportuniste, qui n’a de vrai que le timing. Ils ne sont pas la Révolution, celle-ci leur a opportunément permis de rentrer au pays et de se réorganiser. Ce Gouvernement n'est qu'un gouvernement de l’après-Révolution.

La légitimité se construit par le dialogue
La légitimité obtenue dans urnes n’est pas acquise ad vitam aeternam, c’est un capital qui s’effrite, s’il n’est pas consolidé, et qui se perd, s’il n’est pas préservé. L’Assemblée constituante a été élue sans mandat clair, ni durée déterminée, elle a fini par concentrer l’ensemble des pouvoirs. Décidée dans la précipitation, cette Constituante a fait une unanimité relative, par conviction ou par dépit, des responsables politiques tunisiens. Et de l’avis général, son élection s’est bien passée, même si la fâcheuse question des financements a été savamment éludée.
La majorité issue du scrutin aurait donc dû prendre sa victoire avec humilité au regard de ce contexte politique délicat et essayer, autant que possible, de construire le consensus. Mais la majorité a choisi une autre voie.

La légitimité se perd par l’incompétence
Près de six mois après l’élection, l’Assemblée constituante n’a pas voté une seule loi (hormis les textes permettant son fonctionnement et celui de l’exécutif, passés en force) et ils n’ont rédigé aucune ligne de la future Constitution.

Plusieurs semaines de tractation autour d’Ennahdha ont été nécessaires pour constituer un Gouvernement qui se voulait d’intérêt national, pour aboutir à une majorité hétéroclite, une banale alliance mathématique entre trois partis, avec près de 50 ministres. Un mauvais signal pour un pays qui traverse une crise économique grave et où un Gouvernement resserré aurait été plus efficace et plus réactif. Mais les Tunisiens n’étaient pas au bout de leurs peines, ce Gouvernement n’a présenté son programme d’action que 5 mois plus tard, preuve, s’il en fallait, que les semaines de tractations ont porté davantage sur le nombre de sièges à se répartir, que sur la recherche d’un programme commun.

Les fameux « 100 jours de grâce » que connaissent les nouveaux élus dans les grandes démocraties et qu’ils mettent à profit pour initier leurs grandes réformes, ce Gouvernement les a gaspillés à éteindre des incendies, suite aux déclarations des uns et des autres, notamment des ministres à la déclaration facile, et dont la mue de militant à homme d’État ne prend pas.

Les plus hauts responsables ont donné la priorité aux questions de politique étrangère, avec incohérence et maladresse, en négligeant les urgences nationales. Plusieurs dossiers étaient sûrement plus prioritaires que l’organisation d’un sommet sur la question syrienne ou la relance de l’intégration maghrébine. La majorité n’a pas été à la hauteur des attentes que la Révolution a suscitées, elle n’a pas su prioriser son action.

De gauche à droite: Mustapha Ben Jaafer, Moncef Marzouki et Hamadi Jebali

L’image que renvoi l’exécutif est primordiale dans une période où l’État peine a regagner la confiance de ses citoyens. L’alliance au pouvoir a clairement échoué à restaurer cette confiance. Les Tunisiens ne savent plus qui gouverne le pays, entre un Moncef Marzouki, dont les gesticulations dépassent les prérogatives, et un Hamadi Jebali, dont le parti est en crise d’identité entre son aile dur et ses démocrates. Sans compter un Rached Ghannouchi qui, sans mandat aucun, engage la Tunisie dans des déclarations à l’emporte-pièce à l’occasion de voyages à l’étranger. Ce trio commence à ressembler plus à une armée mexicaine qu’à un exécutif.

La légitimité n’est pas compatible avec la défiance
Après sa victoire dans les élections à la Constituante, le parti Ennahdha, candidat conciliant et rassurant, a laissé place à un parti Ennahdha insolent et revanchard. Les nominations ont commencé à pleuvoir comme sous l’ère Ben Ali, avec des conseillers de cabinets, au statut de ministre ou de secrétaire d’État, des gouverneurs trop partisans, des recrutements dans les cercles familiaux des cadres de l’organisation, etc.. Autant de signaux indiquant la continuité du clientélisme du RCD, sous une nouvelle étiquette.

La légitimité est un contrat
Quand des élus d’Ennahdha défendent la Charia comme une source du droit, alors qu’elle n’a jamais été mentionnée dans leur programme, le contrat tacite, qu’ils avaient avec les électeurs, est trahi. Peut-être était-ce un ballon d’essai, pour tester jusqu’où pourront-ils modeler l’État à leur image.

Quand Ennahdha ne trouve comme réponse aux manifestations, légitimes ou non, pas d’autres réponses que d’appeler ses partisans à une contre manifestation, en prenant le risque de confrontations des Tunisiens entre-deux, c’est mettre en péril le vivre-ensemble.

Quand au lieu du dialogue, le Gouvernement envoie policiers et barbouzes pour réprimer des manifestations pacifiques, et qu’un ministre use du mensonge pour le justifier, c’est que le changement d’ère n’est qu’un changement de couleur politique. Le contrat entre Ennahdha, ses alliés et leurs électeurs n’a plus lieu d’être, tant les termes ont été changés unilatéralement.

Légitimité : mode d’emploi
Pour regagner sa légitimité, la majorité n’a d’autres choix que de rebâtir la confiance avec les citoyens : elle doit reconstruire un consensus plus large, avec les autres acteurs politiques, pour un projet politique auquel adhéreront l’ensemble des forces politiques. La Troïka devra prendre un peu plus à son compte les revendications de la Révolution, sans butter sur des questions de posture dogmatiques. Ennahdha, de son côté, doit lever l’ambiguïté sur ses positions et trancher sur son projet politique ; le congrès de juin en sera l’occasion. Enfin, et surtout, le Gouvernement doit s’attaquer aux chantiers de l’emploi et de la relance économique.
Faute de quoi, ce Gouvernement perdra définitivement sa légitimité, pour ne conserver que sa triste légalité.

Non à la censure pour "la morale et la vertu"!


Ceux qui, hier, n’hésitaient pas à jouer les censeurs contre tout ce qui portait atteinte aux intérêts de l'ancien régime sont encore à l’œuvre, prônant cette fois-ci la défense de  la morale et de la vertu.
Suite à la publication d’une photo du footballeur germano-tunisien Sami Khedira, avec un top model à peine dénudé, une instruction a été ouverte contre l’hebdomadaire Attounoussia التونسية, le journaliste, le secrétaire de rédaction et le directeur du journal. Ce dernier a été arrêté à l’issue de cette instruction.
C’est pour dénoncer la censure, et plus encore la sanction démesurée contre Nassreddine Ben Saida, directeur du journal et ses deux journalistes, que je me joins à l’initiative de plusieurs blogueurs tunisiens en publiant la photo en question.