Hannibal Tv : la voix du populisme


Larbi Nasra, créateur de la première chaîne de télévision privée en Tunisie, a eu tort de croire qu’il pouvait faire ce que bon lui semblait avec la programmation. Il a beau être l’actionnaire principal de la chaîne d’Hannibal TV, il ne peut ignorer qu’il n’est pas propriétaire des ondes sur lesquelles il émet.

La polémique, déclenchée par la programmation d’une émission quotidienne pendant le mois de Ramadan, présentée par Abdelfatteh Mourou, un des fondateurs du parti islamiste Ennahdha, est bien légitime.

En prévoyant de diffuser cette émission, Hannibal TV crée un précédent : la chaîne favorise une organisation politique  au détriment de la centaine d’autres partis autorisés après la révolution. Dans un pays où le paysage télévisuel se résume à trois chaînes, cette initiative n’est pas anodine et pourrait avoir un impact considérable sur l’opinion, et par conséquent sur le résultat des élections à venir.


De l’équité entre les partis

Le poids des partis n’étant pas « mesurable », à défaut d’égalité de traitement on est en droit de s’attendre à un traitement équitable entre les différents acteurs politiques du pays, par l’ensemble des médias et, en l’occurrence, de la part de Hannibal TV, la seule chaîne tunisienne privée qui a obtenu une fréquence sous l’ère Ben Ali.

Abdelfatteh Mourou

Dans cette affaire, il n’y a pas que la chaîne qui ait manqué de jugeote, le cheikh aussi. Abdelfatteh Mourou est, quoi qu’on en dise, une des personnalités les plus en vue de la Tunisie post-14 Janvier. Devra-t-il un retour d’ascenseur à son ami et employeur si, un jour, il est aux responsabilités ?





La chaîne privée semble ignorer toute déontologie et la réaction de Larbi Nasra, n’est pas pour éteindre la polémique. Pire, le fondateur de la chaîne s’offusque des critiques formulées par le syndicat des journalistes et considère qu’il s’agit là d’ingérence dans ses affaires.


Une licence qui n’est pas irrévocable

Ce que Larbi Nasra ne doit pas oublier, c’est qu’il  a obtenu un droit d’émettre sur les ondes  par l’ancien régime. Cette autorisation, tout comme le cahier des charges, n’ont pas tenu compte de l’intérêt général et n’ont pas prévu le changement engendré par la Révolution. Rien d’étonnant, alors, que la question du temps de parole accordé aux différents partis politiques n’ai pas figuré dans le cahier des charges. Cela dit, il est bon de rappeler que cela n’a jamais été  une des préoccupations premières de la chaîne, qui ne ratait pas l’occasion de faire les louanges de Ben Ali avant sa déchéance.

La licence accordée pour émettre sur les ondes hertziennes à Hannibal TV doit donc être remise en question et une enquête menée sur les conditions de son obtention. Il est possible de rouvrir un appel d’offre auquel pourront prétendre d’autres chaînes tunisiennes privées. Une Tunisie démocratique ne peut tolérer sur les ondes une chaîne populiste qui fait du favoritisme entre les acteurs politiques et qui fait l’éloge de son propriétaire comme elle faisait autrefois l'éloge du président déchu.    

2 commentaires:

  1. bien dit ! puisse une divinité quelconque ou un juriste compétent vous entendre

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